Et si le Customer Success Manager (en mode Software as a Service - SaaS) était un super Change Manager ?

13 Avril 2021

Le principe du business à revenus récurrents n’est pas neuf. Plus que jamais, c’est ce que les SaaS recherchent en essayant de fidéliser leurs clients via un système de souscription de licences (subscription based).

author picture Article written by Vincent Halluent

De quoi parle-t-on ?

Le principe du business à revenus récurrents n’est pas neuf. Plus que jamais, c’est ce que les SaaS recherchent en essayant de fidéliser leurs clients via un système de souscription de licences (subscription based). En outre, les migrations cloud que les SaaS proposent poussent les clients à passer d’un business model basé sur des investissements (CAPEX) à un business model orienté coûts opérationnels (OPEX). Un peu comme l’achat d’une voiture de société qui serait soit amortie ou soit louée avec tous les entretiens et réparations.

  

Quel est le challenge ?

Le modèle et les services proposés tendent dès lors vers un système de consommation à la carte (consumption based). Le revers de la médaille pour les SaaS est le risque de désabonnement (‘churn’) ou un faible niveau d’adoption et d’utilisation des solutions proposées. En effet, dans un modèle OPEX, il est plus facile de se désabonner ou de réduire les coûts en réduisant la consommation. Pour les Saas et leurs clients, le niveau d’usage de la solution par l’utilisateur est donc un indicateur clé à suivre puisqu’il va légitimer, ou non, le renouvellement de la licence ou de l’abonnement. L’usage est donc directement lié au niveau de facilité d’adoption et de la valeur que le client va retirer de la solution et du service proposés.

 

Et le défi du Customer Success Manager (CSM) ?

Dès lors, on peut dire que la mission principale du CSM consiste à accélérer la vitesse d’adoption de la Saas et à créer les conditions d’une utilisation forte et rapide de la solution afin de montrer un niveau d’usage élevé, fidéliser son client et ainsi éviter que ce dernier ne choisisse une autre solution technologique, un autre software ou un autre service Cloud.
 

S’il veut y parvenir, le CSM doit agir à deux niveaux :

  • En interne, il doit réussir à intégrer les enjeux de son client dans le quotidien des équipes de sa propre organisation SaaS afin que, du développeur au digital marketer, leurs efforts convergent vers un but unique : créer suffisamment de valeur pour son client et pour les clients de son client.
  • Chez son client, il doit mettre en œuvre un accompagnement efficace et adapté garantissant l’adoption et l’usage optimal de la solution par les équipes. En d’autres termes, il veille à optimiser l’expérience Client (Customer Experience)

 

Mettre en place un tel accompagnement présuppose que le CSM soit très intégré auprès des équipes et ait réussi à instaurer un climat de confiance avec son client Il faut à tout prix éviter l’image du vendeur « pied dans la porte » qui ne cherche qu’à vendre une extension de services et se soucie peu du résultat. Le client attend du CSM qu’il lui apporte des idées pour accélérer le niveau d’adoption de la solution dans laquelle il a investi - et ainsi garantir que l’ensemble des produits et services seront utilisés au niveau attendu -, mais aussi qu’il lui apporte son expertise pour s’ajuster rapidement aux exigences du marché (vitesse de résolution des incidents, sécurité...) Le CSM doit être considéré par le client comme un complice, un allié lui permettant d’atteindre ses objectifs réels. Ceux-ci vont en effet bien au-delà de la mise à disposition de la solution : il s’agit de surtout de la mettre en œuvre afin de réaliser, à l’issue du processus, les bénéfices financiers attendus. Et ces bénéfices vont dépendre dans une très large mesure de l’implication du facteur humain tout au long de ce processus d’implémentation. Être capable de gérer cet aspect humain exige donc de disposer de compétences en Conduite du Changement (Change Management).

Accompagner tout ce processus, et surtout prendre en charge le volet humain, représente bien entendu un challenge lorsque la SaaS est plutôt orientée résultats à court terme car elle risque de considérer ce temps comme un coût et non comme un investissement nécessaire.

La manière dont le CSM opère va dépendre de la complexité de la solution qu’il apporte et de la taille de son client. Pour des solutions simples, un CSM peut gérer plusieurs dizaines de clients à distance. Pour des solutions complexes comme le déploiement d’ERP au sein de grandes organisations par exemple, le CSM va être intégré chez son client et agir en tant que « coach interne » des équipes de son client pour favoriser la meilleure expérience client (Customer Experience) possible. En tant que tel, il doit être en mesure de définir précisément quels sont les besoins en termes d’usage de son client, apporter l’expertise nécessaire au bon moment, et savoir faire intervenir d’autres formateurs et profils aux moments clés de la relation client.

 

Le CSM est un super « Change Manager »

Le Customer Success Manager, dans son rôle de « Change Manager » au service du client, aide celui-ci à mettre en place sa propre Conduite du Changement pour assurer une meilleure adoption et un meilleur usage. Si le client développe au même moment ses compétences en Change Management, compétences qu’il pourra d’ailleurs réutiliser sur n’importe quel autre projet de changement, le bénéfice devient évident et durable.

Le CSM, pour être efficace, doit donc être « outillé » en Conduite du Changement et posséder l’expertise suffisante pour mettre en place une démarche adaptée au contexte et aux populations qu’il accompagne.

Le CSM utilisera idéalement la méthodologie ADKAR de Prosci*, la plus répandue et la plus efficace avec un NPS (Net Promoteur Score) de 97%.

Lorsqu’il créera « l’Awareness » (A), c’est-à-dire la prise de conscience de la nécessité de changer, il entendra de la part de son client « j’ai compris pourquoi votre CRM m’apportera de la valeur ajoutée ».  Lorsqu’il créera du « Desire » (D), c’est-à-dire l’envie d’adopter la solution, il entendra par exemple « j’ai décidé de migrer vers le Cloud tout en étant conscient de devoir adopter des process standardisés ». Lorsqu’il créera du « Knowledge » (K), il entendra « je sais comment utiliser les fonctionnalités selon mes propres usages ». Lorsqu’il créera « l’Ability » (A), c’est-à-dire la capacité à mettre en application, il entendra par exemple, « je suis capable d’utiliser la bonne fonctionnalité en fonction des situations rencontrées en interne ou avec mes propres clients ». Enfin lorsqu’il créera du « Reinforcement » (R), c’est-à-dire un changement durable, il entendra par exemple « je vais continuer à utiliser votre ERP car il me permet d’être plus efficace et de diminuer mes coûts ».

 

Repérer où en est le client dans son parcours de changement ADKAR va permettre au CSM de savoir quelles actions mettre en œuvre pour l’accompagner vers l’adoption et l’utilisation de nouvelles pratiques ou de nouveaux comportements. Il en va de même pour une équipe ou une organisation qui doit évoluer vers de nouveaux usages.

 

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Il agit en 3 temps


Le CSM devenu un Change Manager met ses compétences au service du client en 3 phases :

Phase 1 : ANALYSE DES BESOINS

Le CSM n’a pas pour objectif de gagner un client mais bien de lui montrer le chemin pour créer plus de valeur. Il comprend et récolte les besoins et les usages de ses clients en collaboration avec les vendeurs et les KAM. Son rôle est complémentaire et séquentiel par rapport à la démarche purement commerciale. Le CSM va analyser les niveaux d’adoption et d’usage attendus pour mettre en place les bons indicateurs de performance. Il doit être présent dès le début et challenger le client sur la manière dont il va calculer, avec son aide, le ROI de la solution. Dans cette phase, son profil se rapproche plus de celui de consultant que de commercial.

Il établit ensuite le premier plan de Conduite du Changement pour tous ses collègues de la SaaS qui seront amenés à constamment améliorer et enrichir le parcours et l’expérience du client.

Lors de la phase de vente, il aide à promouvoir la solution SaaS auprès du client en partageant les facteurs clés de succès d’une bonne adoption et d’un bon usage. Il partage également sa connaissance des technologies, des solutions implémentées dans des secteurs similaires et des innovations susceptibles de maximiser l’utilisation.
 

Phase 2 : ADOPTION

La mission du CSM consiste ensuite à accélérer la vitesse d’adoption de la solution proposée au client. Il démontre la valeur de la solution en transformant les caractéristiques techniques de la solution en avantages pour le client.

Le Customer Success Manager apporte un service à forte valeur ajoutée au client, qui va se sentir épaulé et accompagné tout au long de son parcours. En tant qu’interface entre la SaaS et le client, le CSM contribue à créer une image positive du support apporté, et ce, dès la phase de présentation de la nouvelle solution. Le CSM est en grande partie responsable de la première impression du client sur le niveau de support qu’il peut attendre. La capacité à s’adapter en temps réel aux besoins du client, à répondre avec la meilleure expertise possible deviennent des enjeux clés. C’est la raison pour laquelle le CSM va s’attacher à mettre en place rapidement des outils digitaux de mesure d’adoption à mêmes de le renseigner, lui et les experts intervenants, sur le niveau de performance des solutions mises en place.

    

Phase 3 : USAGE

Le rôle du CSM est également d’accroitre le niveau et l’efficacité d’utilisation de la solution. Étant donné que le CSM a déjà une bonne connaissance des usages attendus du client en amont, il collabore avec ce dernier pour lui permettre de tirer le maximum de la valeur ajoutée de la solution.

Au cours du processus de déploiement, le CSM favorise la mise en œuvre des fonctionnalités et aide à implémenter une démarche permettant de régler les problèmes non seulement techniques mais aussi (et surtout) humains que le client rencontre : la plus belle solution technique ne sert pas à grand-chose si elle n’est pas utilisée efficacement. C’est la mission de toute bonne Conduite du Changement que de (ré)concilier gestion du volet humain et gestion du volet technique.

Il n’est pas nécessaire d'enseigner toutes les fonctionnalités de la solution aux clients. Il est en revanche capital d’implémenter une démarche de Conduite du Changement sur les fonctionnalités qui aident le client à obtenir rapidement une valeur perçue et mesurable.

Pour obtenir de meilleurs résultats, les clients doivent être conduits par le CSM sur le chemin le plus court qui mène à la valeur ajoutée et permet d'obtenir un retour sur investissement (ROI) le plus rapidement possible. Plus ce chemin est court, plus la désirabilité de la solution augmente.

Par exemple, au lieu d’aider un client à configurer une nouvelle centaine de fonctionnalités, le CSM comprend d’abord pourquoi le client a besoin de certaines d’entre elles, puis met tout en œuvre pour qu’elles soient adoptées et utilisées rapidement. Le CSM ne doit pas chercher à cocher toutes les fonctionnalités de la solution sur une liste. Il doit plutôt s’efforcer de répondre aux besoins directs du client, chercher à s’adapter et à adapter ses collègues aux changements du client. Il jouera cette fois le rôle de Change Manager en interne.

Son rôle vise à diminuer le risque de désabonnement (‘churn’). La plupart des entreprises utilisent d’ailleurs le taux de désabonnement comme indicateur pour mesurer les performances du Customer Success Management. Les outils de mesure doivent permettre d’anticiper et de réagir aux signaux faibles. Cela garantit que le CSM maîtrise le feu quand il est petit et gérable. Le client aura par ailleurs le sentiment que le CSM est toujours là pour l’aider en cas de besoin.

 

La mesure périodique de la santé des clients est une activité importante qui pourra aider le CSM à entreprendre des actions efficaces dans l’hypothèse où certains clients ne seraient pas satisfaits de la solution, ou pour toute autre raison.

Comme il est assez difficile de connaître l'état exact de tous les clients en temps réel, il est recommandé d'utiliser un outil qui permettra de surveiller la santé des clients et d’améliorer l’efficacité de la solution proposée.

Le CSM défend les intérêts de ses clients en interne. Il nourrit la relation et se bat pour la conserver. Un bon CSM peut complètement changer la trajectoire de sa propre organisation.

Le Customer Success Manager des SaaS est donc avant tout un Change Manager au service du client.

 


 
La méthodologie Prosci est devenue l’une des approches les plus utilisées en matière de Conduite du Changement (Change Management), tant dans les entreprises qu’au sein des organisations publiques. Plus de deux décennies de recherches en matière de Conduite du Changement et de bonnes pratiques ont donné naissance au modèle ADKAR. Pour en savoir plus sur PROSCI et la discipline du Change Management : https://www.proscieurope.com/fr/page/prosci et https://www.prosci.com
Source : https://hbr.org/2019/11/what-is-a-customer-success-manager

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